Victor Hugo

Du plus loin des temps anciens, les livres se souviennent. Les mots, les noms, les majuscules qu'ils portent fièrement, sont la mémoire de l'humanité. Ils ne transportent pas la vérité, mais une matière sonore, qui contient une vision et un sens, profond comme un puis, pour tenter de façonner notre pensée forcément informe du temps et du monde. Les mots ont, pour nous, voyagé. Les poètes ont, pour nous, lu et écrit ce qu'il fallait voir et dire : de l'irréelle Galgala à la non moins imaginaire Jerimadeth, du volcan Heka à l'île de Delos, des murs impurs de Savepta aux tours d'Altona, nous avons erré; grâce à eux, j'ai rêvé l'Asturie et son Nuños enlevé, visité Ispahan et les chevelures teintes au henné, traversé le fleuve Baxile, survolé les Abyssines et descendu l'Euphrate, dans la forêt de Thuringe, j'ai combattu un singe, puis feuilleté quelques volumes à l'Escurial avant de reprendre la Bastille en juillet et au siècle d'après je me tenais aux côtés de Barbès et Blanqui. Avec Hugo, j'ai peut-être été Victor, Bacchus et Shakespeare. J'ai rencontré Nimrod et plus loin Gavroche et je me suis cachée de la cruauté d'Hérode, lorsque la pomme est tombée sur la tête de Newton comme tombe du ciel la vérité, j'ai été à la fois nébuleuses et ver de terre. Mon exode dans les mythes fut entrecoupée des images des sites, car les pages n'ont même plus de papier, et c'est à l'internet maintenant qu'on peut s'abreuver. La légende des siècles a bu tout mon présent, devant et derrière mon écran, elle m'a bue jusqu'à l'ivresse, jusqu'à en perdre connaissance.

 

D'après La légende des siècles, de Victor Hugo

 

 

 

 

 

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