La femme qui cuisinait les chats

- Tu cherches ton chat ? avait-elle dit. Tu cherches ton chat? Eh bien, tu viens de le bouffer !

 

Imagine la tête qu'a du faire le forain, quand il a réalisé que son chat adoré, son chat qu'il traitait mieux que sa femme, son chat qui avait le droit de manger à table, et avant elle, que son chat, il venait de le manger, pensant que c'était du lapin. Ce succulent lapin aux pruneaux, c'était en fait son propre chat cuisiné patiemment par sa femme. 

 

Depuis des années, elle était enfermée dans cette maison, confinée au ménage, aux repas, du chat et de son forain de mari, qui ne savait rien faire d'autre que la battre et la violer, quand il avait bien bu. 

 

Depuis des années, elle lui piquait un franc par ci, un franc par là, qu'elle rangeait méthodiquement dans une boite de pâtes alimentaires, au fond d'un placard, où il n'allait jamais fourrer son nez de soulot. 

 

Et lui ne vit rien arriver, trop occupé à caresser cyniquement son chat, pendant qu'elle attendait au fond de la cuisine que Monsieur et le félin finissent leurs assiettes pour pouvoir se mettre à table. 

 

Matante Madeleine. Combien de fois ma mère nous l'a racontée cette histoire? Plus qu'une histoire, une légende. Matante Madeleine avait tué le chat et l'avait cuisiné, et puis elle s'était sauvée en courant, attraper un train, n'importe lequel, pourvu qu'il l'emmène loin, aussi loin que possible du méchant forain. 

 

Devant elle, au guichet, un homme prend un billet pour Thionville. Elle ne connait pas cette ville, elle ne sait pas ou se trouve le bled. Alors elle décide: un billet pour Thionville s'il vous plait, vite !

 

Elle s'assoit dans le train, et se met à pleurer. A trembler de tous ses membres. L'homme qui se trouvait lui aussi dans le train, l'inconnu du guichet, s'approche et lui demande ce qu'il se passe, pourquoi elle pleure? 

 

Alors elle lui raconte tout: le chat, les pruneaux, les coups de poing, le sol froid de la cuisine, le forain, mauvais comme la peste, le forain qui va la poursuivre, et qu'elle fuit. Elle fuit. 

 

Alors l'inconnu l'entoure de ses grands bras de boulanger. Et il ne le sait pas encore, mais Madeleine, il va passer le restant de sa vie avec elle. Et elle ne fuira plus jamais. 

 

Ca c'est l'histoire de la tante de ma mère: matante Madeleine. 

 

 


La vieille qui n'avait plus de mollet

 

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