Assis à l'ombre d'un toit de tuiles, il lui lit à voix haute:
Je suis une brique. Tu es une brique. Nous sommes tous une brique, unique, faite d'argile et de soleil. Nous avons cuit dans le four de la vie et nous tendons à faire partie d'un mur, à construire un abri, une oeuvre collective. Nous tendons à nous agglomérer aux autres briques, pour pouvoir élever, ériger, dresser quelque chose de plus grand que nous-même et qui nous dépasse.
Elle le regarde avec une rare intensité. Il poursuit:
A quel mur t'es-tu encimentée? Avec quelles autres briques? Et qu'as-tu construit? De quelle tourbe provenons-nous? Et quelles mains, de quel ouvrier, nous a façonné? A quel point suis-je desséché, abîmé, fêlé? Combien de fois as-tu été choquée ?
Il s'interrompt. Elle dit:
C'est beau.
Il reprend:
Je suis une brique. Tu es une brique. Nous sommes une brique, unique, qui attend de trouver son maçon, son architecte, son maître d'oeuvre. Nous attendons d'être mis en oeuvre, dans le projet de quelque tour ou d'un mur, qui s'écroulera un jour sur nous même.
Elle fronce les sourcils. Il referme son carnet.