Strass

En marchant dans les rues de Strasbourg, je croisai une femme, au visage rond, aux petits yeux perçants, qui ne me regarda même pas, ou peut-être, si elle me vit, le fit-elle avec un grand mépris. Quelques minutes plus tard, toujours sur le même trottoir, je croisai la même femme. Elle avait au visage la même froideur, la même rondeur. Je me demandai comment elle avait fait pour réapparaître comme ça, si elle avait fait très vite le tour du quartier, ou bien si c’est moi qui tournais en rond. Il m’avait pourtant semblé marcher toujours tout droit. Je continuai mon chemin sans plus y penser, lorsque, quelques instants plus tard, je la croisai de nouveau. Dans le même temps, du coin de la rue opposée, arriva un autre passant, qui se révéla aussi être cette femme. Je la voyais maintenant en double. Bientôt, je croisai un groupe de gens, et ils avaient tous le visage et les manières dédaigneuses de cette femme. Ils étaient tous, chacun, cette même femme, qui revenait encore et encore, par grappes de gens marchant dans la rue. Vieillards, hommes, enfants, tous ceux que je croisai s’avéraient être cette femme, quand ils arrivaient à ma hauteur. Je me demandai si je n’étais pas en train de devenir folle. Puis, petit à petit, je commençai à m’habituer à cette uniformisation, à ce visage rond, à ces yeux perçants et méprisants, je m’habituai à ce dédain, à cette répétition sans fin du dédain. Je me dis que peut-être, c’est moi qui voyais juste. Les passants indifférents sont tous cette femme au visage rond, au regard dédaigneux, aux yeux perçants, qui déambule dans les rues de Strass.

 

 

>> Heim

 

 

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