En Italie, dans les spectacles de marionnettes traditionnels, la mort est un personnage récurrent, un archétype des répertoires.
Mais si elle entre en scène dans un éclair pour faucher aveuglément toute forme de vie, l'autre marionnette lui échappe toujours, en récussitant miraculeusement après une agonie hilarante. Et c'est souvent Pulcinella qui finit par tuer la mort et la réexpédider en enfer.
Le sourire ironique et figé d'un petit crâne ricane sur le doigt tendu du marionnettiste à gaine: la mort prend vie, elle se manifeste, littéralement elle danse, elle fait la fête dans ses mains.
Nous avons choisi de donner la parole à ce personnage dans le spectacle, de lui faire tenir un monologue. Notre mort à nous est une diva, une poupée imbue d'elle-même, snobinarde, dominante, égocentrée, insupportable. Je finis donc par la tuer avec mon autre main, je l'étrangle à main nue : c'est une manifestation de vie, par une invitation à rire de la mort. A rire jaune, peut-être.
En langage marionnette, le dialogue avec la mort est sans fin, car la marionnette dépend de cette transition tant redoutée entre l'animé et l'inanimé. Et pour nous, qui l'animons, elle meurt et naît avec chaque représentation du spectacle.
Je pense qu'il y a au fond de chaque création quelle qu'elle soit tout ou partie de ce désir de mort, de cet affront de la mort, comme une provocation poétique et désespérée, une impertinence immature face à l'autorité suprême, un flirt effronté, presque une histoire d'amour avec la mort.